509,06 euros pour ne pas avoir avoir communiqué un renseignement ... inutilisable. Quand le Parquet dérape !
De plus en plus de sociétés reçoivent une "proposistion de transaction" de 509,06 euros. De quoi s'agit-il ? Faut-il payer ?
Partons d'un exemple concret
Un véhicule immatriculé au nom de la société VAN QUICK a été flashé en excès de vitesse. Quelques semaines plus tard, la société VAN QUICK reçoit de la Police un document intitulé "perception immédiate" mentionnant un montant à payer (ente 50 et 200 euros suivant l'importance de l'excès de vitesse). La société VAN QUICK s'empresse de payer ce montant pour clôturer le dossier. En effet, ce paiement "éteint l'action publique" de sorte que le Parquet n'aura plus aucune possibilité de poursuivre qui que ce soit suite à cet excès de vitesse.
Ce que la société VAN QUICK n'a pas vu, c'est que le document "perception immédiate" lui demandait également d'identifier le conducteur.
Il faut dire que ce document est tellement mal rédigé qu'il n'est pas étonnant que de nombreuses sociétés omettent de remplir leur obligation d'identifier le conducteur.
Notre situation de départ est donc la suivante : la société VAN QUICK a payé pour l'excès de vitesse mais n'a pas communiqué l'identité du conducteur.
Quand le Parquet dérape !
Quelques mois plus tard, c'est la mauvaise surprise !
La société VAN QUICK reçoit du Parquet un document intitulé "proposition de transaction" d'un montant de 509,06 euros (en plus du montant déjà payé pour l'excès de vitesse). Ce montant de 509,06 euros est réclamé à la société VAN QUICK parce qu'elle n'a pas communiqué l'identité du conducteur (article 67ter). Or, ce renseignement est totalement inutile et inutilisable.
Il me revient de vous expliquer ce qui me permet de prétendre que, même si la société avait identifié le conducteur, ce renseignement aurait été inutile et inutilisable.
Le paiement de la "perception immédiate" relative à l'excès de vitesse a "éteint l'action publique" relative à l'excès de vitesse. Plus personne (ni le conducteur, ni la société) ne peut encore être poursuivi concernant l'excès de vitesse. Connaître l'identité du conducteur ne permet donc pas au Parquet d'entamer des poursuites qui sont devenus légalement impossibles. C'est certain.
Mais à quoi aurait pu servir l'identification du conducteur ?
L'identité de conducteur permettrait-elle à la Police ou au Parquet d'établir une base de données des "récidivistes" ?
Certaitement pas. Pour trois raisons :
- La première raison : la récidive implique une condamnation par un Tribunal, ce qui ne sera pas le cas du conducteur dénoncé.
- La deuxième raison : l'identification du conducteur peut se faire à l'insu de la personne dénoncée qui ne sait non seulement pas qu'elle a été dénoncée mais pas non plus que le Parquet la considère comme récidiviste.
- La troisième raison : La Police ou le Parquet ne demandent jamais à la personne dénoncée si elle reconnaît avoir été le conducteur au moment de l'excès de vitesse.
Dans ces conditions, comment la Police ou le Parquet pourraient-ils sérieusement et légalement prétendre utiliser l'identité du conducteur dénoncé pour tenir une banque des données des récidivistes ? Et qu'en est-il du respect de la protection des données ?
La réponse du Parquet est désolante puisqu'il se contente de répéter inlassablement que son objectif est de lutter contre la récidive sans qu'il ne soit capable de développer le moindre argument en réponse aux miens.
Vous l'aurez compris, l'absence d'identification du conducteur n'a aucun effet concret, si ce n'est de permettre au Parquet de réclamer un paiement complémentaire de 509,06 euros.
Faut-il payer ?
Contrairement à ce que le Parquet tente de faire croire, la société ne "doit" pas payer le montant de 509,06 euros. Il s'agit uniquement d'une "proposition de transaction" que la société est libre d'accepter ou non. C'est certain.
Mais la société a-t-elle malgré tout intérêt à payer le montant de 509,06 euros ? Je ne le pense pas.
En réalité, le Parquet utilise son habituelle techchique consistant à "faire peur" en prétendant que le non-paiement va entraîner des sanctions encore plus lourdes.
Actuellement, je reçois quotidiennement des demandes d'intervention de sociétés qui sont scandalisées par la réception de la lettre leur proposant de payer 509,06 euros.
Je leur réponds d'abord que, jusqu'à présent et à ma connaissance, le Parquet n'a pas encore cité une quelconque société devant le Tribunal de Police dans le cas qui nous occupe (ni envoyé d'ordre de paiement).
Je suis pourtant impatient de pouvoir défendre les arguments qui précèdent devant un Tribunal. Je suis curieux de voir la réactions des Juges - que je cotoye quotidiennement - lorsqu'ils entendront que le Parquet réclame de lourdes sanctions financières à l'égard de sociétés qui ont déjà payé pour l'excès de vitesse mais ont omis de fournir un renseignement parfaitement inutile et inutilisable.
Les audiences des Tribunaux de Police sont consacrées à sanctionner des personnes ayant adoptés des comportements particulièrement dangeureux et dommageables (accidents graves, alcoolémie, grands excès de vitesse, ..). Les Juges (en sous-effectif) risquent de ne pas apprécier que le Parquet leur demande de consacrer leur temps et leur énergie à sanctionner la société VAN QUICK qui, après avoir payé pour l'excès de vitesse, a omis de fournir un renseignement parfaitement inutilisable et sans relation avec la sécurité routière.
Si j'étais dirigeant d'une société (ce que je suis également), je ne paierais pas le montant de 509,06 euros. J'attendrais de voir si le Parquet m'adresse un ordre de paiement ou cite ma société à comparaître devant le Tribunal de Police.
Dans ce cas et grâce à l'assurance "protection juridique" qui couvre le véhicule de société, je consulterais gratuitement un avocat spécialisé qui défendra efficacement les intérêts de ma société.
A bon entendeur,
Bruno GYSELS
Avocat spécialiste en circulation routière (spécialité reconnue depuis 2005)
Ancien Juge-suppléant au Tribunal de Police
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